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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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29 septembre 1844

29 septembre [1844], dimanche midi ½

Bonjour, mon Toto adoré, bonjour mon cher amour, bonjour ma vie, ma joie, mon âme, mon tout. Comment vas-tu ce matin, mon Victor adoré ? J’ai regretté de ne t’avoir pas fait mettre ton gilet de cachemire cette nuit, car il était tout prêt et raccommodé à neuf. Ce matin j’ai rangé toutes tes petites affaires ; ton habit accroché dans mon armoire à la place d’honneur, ton gilet et ta cravate dans mon armoire, sur mon mantelet, tes petits souliers niffés [1] par moi et tes chaussettes de soie repliées comme si de rien n’était. À défaut de vous, mon cher petit cochon, je m’attache à vos nippes et je les soigne et je les débarbouille con amor.
Vous étiez très beau hier, mon Toto, trop beau même, car ce qui abonde vicie dans ce cas-ci et trouble furieusement ma tranquillité. Du reste, et pour être sincère, je ne suis pas sûre que votre habit soit trop large. Il se peut que je me sois trompée et qu’il faille qu’il soit ainsi. Rapportez-vous en à des esprits plus sûrs que le mien. Tout ce que je peux vous dire, c’est que vous étiez très gentil hier et que les femelles royales sont des gaillardes bien heureuses. En attendant, je regarde le temps tristement et je m’applique à me trouver du courage et de la résignation pour demain, chose très peu facile et très peu conciliable avec le besoin que j’ai de passer une journée avec vous. Hélas ! ……

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 199-200
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette


29 septembre [1844], dimanche soir, 11 h. ¾

Mon Toto chéri, je t’écris à une heure presque indue. Tu en sais la cause ? On est venu chercher Mme Luthereau très tard et depuis j’ai compté ma dépense et fait ma toilette de nuit. Cependant, je ne veux pas perdre mon droit de gribouillage et je me hâte d’en user avant ton arrivée.
Je t’aime, mon Victor chéri, je t’aime, mon pauvre ange. Je ne te rends pas responsable de ma mauvaise chance et du mauvais temps. Je reconnais que tu es la bonté même. Je t’aime, je t’aime, je t’aime, mon Victor. Sois en bien sûr.
Tantôt cette stupide Suzanne a été cause que je ne t’ai pas vu en aller. Je l’aurais battue de bon cœur pour lui apprendre à venir se jeter à travers mes jambes au moment où je cours après ton regard. J’en ai été toute malheureuse jusqu’au moment où tu es revenu. Vois-tu, mon amour, ce n’est ni de la manière, ni de l’exagération, mais je ne peux pas perdre une seconde de toi, et surtout par ma faute, sans en souffrir horriblement. Aussi tu penses si j’ai été contente d’avoir manqué mon rendez-vous traditionnel.
Je crois qu’il fera beau demain. Le bon Dieu nous doit bien cela, à toi, à Claire et surtout à moi pauvre Juju. Je serai bien heureuse si nous pouvons sortir demain.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 201-202
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Le sens est à élucider, mais la lecture n’est pas douteuse.

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