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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 septembre [1844], mercredi midi ¾

Bonjour, mon Toto adoré, bonjour mon bien-aimé, bonjour mon petit chiffonnier, comment va : Champs-Lysées [1] ? J’attends de ses nouvelles avec impatience. Voime, voime, et de ses puces aussi. Affreux Toto, va, il n’y a que toi au monde pour t’exposer à attraper la gale, les puces et le reste avec le premier chat, coiffé ou non, que tu rencontres dans la rue. Taisez-vous, vous êtes un cochon. (en Wallon  : [illis.]). Dites-donc vous, est-ce que vous n’allez pas bientôt finir vos poésies amoureuses avec Mlle Maria de N. [2] ? Cela commence à me faire monter la moutarde au nez. Je ne trouve pas que la prose wallonne soit une compensation suffisante à cette impertinente et trop prolongée mystification. Je vous prie de m’en tirer d’un autre tonneau ou je vous ficherai des coups. En attendant, je vous conseille de marcher droit et plus vite que ça.
Claire n’a plus que cinq jours à rester à la maison, mon Toto chéri. Penses-y et tâche de nous donner la joie que tu nous avais promise [3]. Je t’en prie, je t’en supplie, mon adoré petit homme. D’ici là, je vais t’aimer de toute mon âme et te désirer de toutes mes forces.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 183-184
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette


25 septembre [1844], mercredi soir, 4 h. ¾

Mon cher petit bien-aimé, je suis à toi, je t’aime, je voudrais mourir pour toi. J’ai le cœur rempli d’un amour ineffable et dévoué dont tu ne connaîtras jamais l’étendue car, malheureusement, il ne me sera jamais donné de te prouver mon amour autrement qu’en tendresses et qu’en protestations. Ce serait pourtant le plus beau jour de ma vie que celui où je pourrais faire acte de véritable dévouement en te donnant tout mon sang.
J’ai vu Mme Luthereau tout à l’heure. Elle n’a fait qu’entrer et sortir. Elle a apporté à Claire une petite théière en terre cuite belge. Elle venait me dire qu’elle pensait dîner dimanche avec nous.
J’ai écrit tantôt de mon mieux à la bonne Mlle Hureau, ainsi qu’à toutes ces dames Triger, Féau, y compris la mère Ledon. A propos de mère Ledon, je n’ai plus d’argent. Il faudra que tu m’en donnes pour elle, si tu peux, d’ici à la semaine prochaine.
Je te dirai, mon amour, que je crois qu’on commence à déménager de mon futur appartement. Je ne sais pas jusqu’à quel point je devrais m’en réjouir car tu es trop occupé et trop fatigué pour pouvoir diriger un déménagement. Aussi, je ne pousse pas autrement de rugissement, je laisse faire et j’attendrai très volontiers un temps plus opportun pour toi (s’il peut y en avoir jamais). En attendant, je te baise et rebaise de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16356, f. 185-186
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Champs-Lysées semble être un chat adopté par Victor Hugo.

[2Allusion à Doña Maria de Neubourg, la reine d’Espagne dans Ruy Blas. Juliette désigne à travers elle la duchesse d’Orléans.

[3Victor Hugo a promis à Juliette qu’ils iraient se promener à Villeneuve-Saint-Georges pendant les vacances de Claire.

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