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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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13 février [1846], vendredi matin, 10 h. 

Bonjour mon Toto, bonjour mon petit homme chéri, bonjour toi je t’aime, comment que ça va ? Je gage que vous n’avez pas seulement rêvé de moi cette nuit ? Eh ! bien moi je ne suis pas si bête que vous, je m’en suis régalée à cœur joie. Ce que je n’ai pas en réalité le bon Dieu me l’envoie en rêve, c’est tout autant. Aussi cette nuit ai-je eu une bonne petite culotte de bonnes choses. Il est vrai que ces magnifiques rêves ressemblent un peu à des mystifications mais enfin j’aime encore mieux cela que rien. Baisez-moi vous et venez donner un peu de consistance à mes rêvasseries.
Je voudrais bien savoir un jour ou deux à l’avance quand j’irai à la Chambre pour me préparer. Sans plaisanterie il faut que j’écrive à ces petites filles au moins la veille. Je vais donc vous voir dans votre splendeur ! Car je ne suppose pas que vous ayez l’intention délicate de m’y envoyer un jour où vous serez à l’Académie ? C’est pour le coup que je redemanderai MON ARGENT A LA PORTE et que je pousserai d’affreux cris. Je n’y vais que pour vous, M. Dubocage a peu d’attraits pour moi ainsi que tous ses HONORABLES collègues dont je me fiche supérieurement. Ce que je veux voir, c’est vous, vous tout seul et si cela se pouvait même je vous aimerais mieux sans la sauce de l’Assemblée mais enfin pour vous voir je consens à l’AVALER à la condition que vous m’enverrez un petit baiser du regard.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16362, f. 155-156
Transcription d’Audrey Vala assistée de Florence Naugrette


13 février [1846], vendredi soir, 5 h. ¼

Je vais te voir bientôt, mon amour béni et j’en suis bien heureuse d’avance. Je sais bien que mon bonheur ne sera pas de longue durée mais enfin c’est égal, si peu qu’il durera ce sera un siècle de bonheur et de joie pour mon pauvre cœur.
Mme Guérard [1] sort d’ici, je lui ai donné 10 F., elle viendra un jour régler avec moi. Du reste elle avait dîné hier chez Mme Parent avec la belle Mlle Dédé qu’elle ne se lasse pas d’admirer et qui est aussi belle que son père. Vous pensez comme j’accueille ces cancans et comme je crois ça, avec ça que VOUS ÊTES BEAU, VOUS. Voime, voime, à côté il y a de la place et je voudrais bien voir que mamzelle Dédé vous ressemble et sans ma permission. Cher petit homme adoré, mon Victor, mon bien-aimé, mon amour, mon cœur se fond quand je pense à toi si grand, si beau, si noble, si doux, si généreux, si ineffable et si divin. Je voudrais te servir à genoux, je voudrais te donner ma vie jusqu’à la dernière goutte. Je t’aime mon Victor, je t’adore mon cher petit Toto. Viens bien vite mon Victor chéri pour que j’aie le temps de te voir, de t’entendre, de te baiser et de te caresser. D’ailleurs il pleut et ce n’est pas prudent d’errer le soir sous la pluie. Venez donc tout de suite. Je le veux et surtout je vous en supplie, d’ici là je baise toute votre ravissante petite carcasse de Pair de France depuis tout jusqu’à bien autre chose. Je peux bien me permettre de loin cette licence poétique sur votre auguste personne. Je suis sûre au moins que vous ne vous y refuserez pas.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16362, f. 57-158
Transcription d’Audrey Vala assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Amie de Juliette, qui sera présente à ses côtés pour l’enterrement de Claire.

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