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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 28 avril 1856, lundi matin, 8 h.

Bonjour, mon cher petit bien-aimé, bonjour. Je vous aime : prenez-en votre parti comme j’en ai pris le mien et tâchez de me faire contrepoids en m’aimant de votre côté de toutes vos forces. À propos j’ai oublié de vous prévenir hier que j’allais, aujourd’hui probablement, me donner une CULOTTE [1]… de ROBES. À force de faire de la terre le fossé et du fossé des jupes je n’ai plus même une feuille de figuier dans ma garde-robe. Si bien que cela me forcerait, vu le préjugé de la pudeur, à me cacher à tous les yeux, même aux vôtres, si je n’y mettais bon ordre tout de suite. Vous savez que je n’abuse pas du RAMIER [2] en général et de la HAUTE NOUVEAUTÉ en particulier et que lorsque je me mets en frais de costume c’est que j’y suis réduite par la plus impérieuse nécessité. Ainsi vous pouvez vous tranquilliser d’avance de me voir prendre IN EXTENSO quelques mètres de mousseline de laine DE COTON. Remarquez que je n’ai pas voulu prendre DES VERGES de peur qu’elles ne vous servent à me fouetter économiquement. Sérieusement, mon cher adoré, il faut que j’achète une couple de robes aujourd’hui si je veux pouvoir mettre le pied dehors en plein jour car tous mes restes de penaillons ne peuvent plus me servir que dans l’intérieur. Je ferai pour le mieux, tu n’en doutes pas puisque jamais tu n’as voulu m’attribuer une somme fixe pour mon entretien. Je prends toutes ces précautions explicatives d’avance pour qu’il n’y ait pas de malentendu possible entre nous, mon cher petit homme, car rien ne m’est plus pénible que de te voir mécontent pour des choses qui me paraissent justes et nécessaires. J’attendrai d’ailleurs avant de me décider que tu m’en aies donné la permission [3].

BnF, Mss, NAF, 16377, f. 130
Transcription de Chantal Brière

Notes

[1« Se donner une culotte » est une expression populaire qui désigne l’état d’une personne qui a mangé ou bu avec excès.

[2À élucider.

[3La fin de cette lettre révèle assez clairement la situation de dépendance financière qui était celle de Juliette.

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