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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 janvier [1839], vendredi soir, 8 h.

C’est encore de mon lit que je t’écris, mon adoré. Je vais cependant me lever pour dîner et pour laisser remuer mon matelas. Quelle absurde fatalité qui fait que je suis malade comme un chien le jour où tu venais déjeuner avec moi ! En vérité, le bon Dieu n’est pas juste de m’envoyer la maladie et la tristesse le jour où tu venais me donner la vie et le bonheur. Et quoiqu’on doive respecter la providence même quand elle nous frappe, je n’en suis pas moins révoltée et attristée contre ce hasard malencontreux qui me prive de la plus grande joie et du plus grand bonheur de ma vie. Encore, si ces occasions étaient plus fréquentes, cela ne me consolerait pas, mais cela empêcherait mon découragement et adoucirait l’amertume de mes regrets. Enfin il faut vouloir ce qu’on ne peut empêcher. Tâche seulement de n’[être  ?] pas un mois entre ce déjeuner manqué et un autre si tu ne veux pas que je sois la plus rageuse et la plus malheureuse des femmes. Je vais écrire à Mlle François à Mme Krafft pour qu’elle tâche d’aller demain à la caisse. En même temps, j’écrirai à Mlle Hureau pour la prévenir que Claire ne rentrera que lundi à la pension. Je n’attendrai peut-être pas ton retour pour renvoyer les lettres à la poste parce que j’affranchis celle de Mlle Hureau et que j’enverrai les autres en même temps.
Je t’aime, mon Victor adoré, je t’aime de toutes les forces de mon âme. Si tu savais quelle admiration me causenta tes sublimes versb, et quelle extase j’éprouve à ta seule vue, et quelle frénésie s’empare de tout mon être quand ta bouche touche ma bouche, tu ne serais pas étonné de la résistance que j’apporte à de certaines caresses qui me rendent folle à l’état de santé et me tueraient quandc je suis malade. Je t’aime, mon Victor, je t’admire, mon grand poète, je t’adore, mon Toto. Papa est bien i. J’aime bien les bonbons qu’il m’a donnésd mais ce que j’aime encore mieux c’est sa douceur que tout l’art des confiseurs et des raffineurs ne saurait atteindre. Je vous aime vous [illis.] !!!!!

Juliette

BnF, Mss, NAF 16337, f. 13-14
Transcription de Madeleine Liszewski assistée de Florence Naugrette

a) « cause ».
b) « ver ».
c) « quant ».
d) « les bonbons qu’il m’a donné ».

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