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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 mars 1847

25 mars [1847], jeudi matin, 9 h. ¾

Bonjour, mon petit Toto, bonjour, mon vieux taquin, bonjour. Je vous prépare un Adagio suivi d’un Crescendo fortissimo avec point, contrepoing, croches et griffes dont vous me direz des nouvelles. Nous verrons sur quel ton vous le prendrez mon cher dilettante.
Le temps paraît vouloir se gâter aujourd’hui : je voudrais qu’il attendît que je sois revenue tantôt. C’est bien le moins, si le bon Dieu était juste, qu’il me donne ces pauvres petites promenades si courtes libres de pluie, de froid et de vent. Mais quoi, il songe bien à moi ma foi, il a bien d’autres académiciens à fouetter. Je m’en consolerais peut-être si j’étais sûre qu’il les fouette bien fort mais je crains qu’il ne les ménage trop et cela m’ôte toute ma satisfaction.
À propos, voici bientôt l’heure de la mairie. Il est probable que l’affaire de Charles [1] te forcera d’y aller avant de te rendre à l’Académie. Car ça n’est pas aussi simple qu’on croit et puis tu travailles. Je comprends tout cela admirablement et je me résigne encore plus admirablement à mon rôle de femme mystifiée, mais non pas sans le savoir. Le jour où je pourrai reprendre ma revanche vous m’en direz des bonnes nouvelles. Jusque-là, je vous conseille de profiter de votre reste et de vous dépêcher. Sur ce baisez-moi et méfiez-vous.

Juliette

MVH, α 7868
Transcription de Nicole Savy


25 mars [1847], jeudi après-midi, 3 h. ½

Je te défends d’avoir mal à la gorge toi. Je n’ai pas besoin que vous ayez d’autre mal que celui que j’ai le droit de vous faire, c’est bien le moins que vous mes laissiez ce privilège entier et intact puisque vous m’avez pris tous les autres.
Vous allez donc parler aujourd’hui, mon grand Toto ? En vérité vous êtes bien bon de prodiguer vos admirables pensées à des oies qui n’y comprennent rien et dont l’esprit est en dedans comme les pattes. Quant à moi, si j’étais vous, je garderais mes trésors d’éloquence pour de meilleures occasions. Voilà ce que je me permets de vous dire et de penser.
Comment donc l’affaire de Charles [2] n’a-t-elle pas eu lieu aujourd’hui ? Ah ! c’est parce que tu t…r…a…v…a…i…l…l…ea. Je me disais aussi comment cela se fait-il, maintenant tout s’explique et c’est beaucoup plus simple qu’on ne croit de premier abord. Taisez-vous vilain monstre vous voyez bien que je me fiche de vous. Cela m’arrivera plus de quatre fois par jour et je m’en fais zonneur et gloire. Baisez-moi.

Juliette

MVH, α 7869
Transcription de Nicole Savy

a) Sans s.

Notes

[1Il doit s’agir du remplacement de Charles Hugo pour la conscription. Fin avril, Hugo paiera 1100 fr. un remplaçant, un dénommé Grangé.

[2Voir la lettre de la veille. Juliette reprendra ironiquement à plusieurs reprises ces motifs invoqués par Victor pour expliquer qu’il ne peut pas venir.

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