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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 6 octobre 1861, dimanche matin, 8 h.

Bonjour, mon pauvre trop aimé, bonjour, que la paix et la confiance soient dans nos cœurs aujourd’hui et toujours. Je suis si découragée, si brisée et si humiliée de cette perpétuelle oscillation de défiance qui vient de toi à moi et de moi à toi que je donnerais avec joie et sans la moindre hésitation ce qui me reste à vivre pour en être délivrée tout de suite. Que se passe-t-il donc en nous et autour de nous pour que nous nous effrayons ainsi de notre ombre et de celle des autres ? Vraiment je ne le sais pas ; mais ce qui n’est que trop sûr, c’est que nous nous tourmentons à qui mieux mieux et que nous assombrissons jusqu’à la mort ce pauvre reste de vie déjà assez terne et assez maussade par lui-même. À ta place je chercherais et je trouverais le moyen de nous délivrer de ces obsessions de nos jalousies hors de saison en éloignant d’une part M. Q. [1], d’autre part Mme E. [2] Ce moyen si simple et si radical de nous rendre le calme et la raison mérite que tu y apportesa toute ta bonne volonté. Quant à moi, je suis prête à tout faire pour cela. En attendant je t’aime comme si de rien n’était et comme si j’étais la plus jeune, la plus belle, la plus aimée et la plus heureuse des femmes car il n’est au pouvoir de rien, de personne, pas même de moi, de ne pas t’aimer de toute mon âme.
J’espère que tu as passé une bonne nuit, mon pauvre injuste, et que tu te portes bien ce matin. Je le désire de toutes mes forces et de tout mon cœur. Je désire que Mlle Allix puisse venir tantôt mais je crains que la visite de son jeune veau-[réal ?] ne lui fasse faire l’école buissonnière et que nous l’ayons très peu de temps. Il aurait fallu penser à cela beaucoup plus tôt. Enfin nous ferons de notre mieux. Pourvu que tu sois content je ne demande pas autre chose et je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16382, f. 117
Transcription de Florence Naugrette

a) « apporte ».

Notes

[1Peut-être Kesler (pourtant peu ragoûtant selon Juliette elle-même), qu’ils surnomment Quesnard ?

[2Vraisemblablement Mme Engelson, qui suscite la jalousie de Juliette dans d’autres lettres de la même époque.

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