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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 décembre [1845], jeudi matin, 10 h. ½

Bonjour, mon aimé, bonjour, mon plus que aimé, bonjour, mon adoré petit Toto, bonjour, comment vas-tu ce matin ? Moi je suis triste et découragée, car je crains que tu n’aies pris le change cette nuit sur la rage de tête que j’avais et dont je ne pouvais pas triompher malgré tous mes efforts. À peine as-tu été parti que je me suis mise à pleurer à sanglots du regret de t’avoir mécontenté. Du reste, voilà près de huit jours que je suis en proie à des douleurs de tête abominables. Il y a des moments où je crains de devenir folle. Grâce à Dieu, c’est un peu passé ce matin. J’espère que m’en voilà débarrassée pour quelques jours. Aussi, mon cher petit bien-aimé, tu ne me verras plus ce visage triste et maussade que me fait la souffrance, je te le promets. Je ne sais pas si tu pourras me faire sortir aujourd’hui, mais dans tous les cas, je ne sortirai pas seule parce que c’est aujourd’hui Noël et que les dames Féau seront chez leur mère malade. Quant à ma fille, elle sera aux offices toute la journée. Je resterai chez moi, trop heureuse si tu viens m’y voir et si tu restes avec moi quelques instants. En attendant, je t’adore et je baise tes quatre petites pattes blanches.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16361, f. 297-298
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette


25 décembre [1845], jeudi après-midi, 3 h. ½

Tu avais l’air froid et mécontent tantôt, mon cher petit Toto, cependant je t’aime de toute mon âme et je n’ai pas une mauvaise pensée que je puisse me reprocher à ton sujet. Je sais bien que je suis loin d’être aimable, mais cela tient à la fréquence et à la violence de mes maux de tête qui ne sont pas des maux de tête ordinairesa, je t’assure. Voilà trois jours de suite que je vomis mon déjeuner et à présent encore je suis loin d’avoir le cœur assuré. Et voilà pourquoi la pauvre Juju est grognon et maussade sans que son cœur y soit pour rien. Tu es trop bon pour m’en vouloir de mes infirmités et trop juste pour ne pas m’aimer un peu en échange de tout l’amour que je te donne. Baise-moi, souris-moi, porte-moi et viens bien vite t’installer au coin de mon feu. C’est le seul moyen de me guérir tout de suite. Vous avez paru scandalisé de ma réclamation au sujet de la culotte. Je vous demande mille pardons de mon indiscrétion grande, une autre fois je serai plus réservée. Cependant, si je l’ai demandée, c’est plus par besoin que par gloire, quoique vous trouviez la chose exorbitante après trois mois d’intervalle. C’est probablement parce que vous n’en avez pas beaucoup profité. Si vous aviez fait comme moi, vous l’auriez usée du premier coup. En fait de culotte, je ne ménage rien, moi, voilà comme je suis. Baisez-moi, pardonnez-moi et aimez-moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16361, f. 299-300
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « ordinaire ».

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