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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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8 juillet [1844], lundi, midi ¼

Bonjour, mon bon petit bien-aimé ; bonjour, mon Toto adoré, bonjour, mon cher petit amant ravissant. Comment vas-tu, mon pauvre bien-aimé ? Tu travailles comme un pauvre chien et tu n’as pas le temps de penser à moi. Je le sais et je te pardonne à la condition que tu ne te fatigueras pas trop et que tu ne penseras pas à d’autres. Vous savez que vous êtes un profond scélérat, mon Toto, et que vous êtes capable de tout dès qu’il s’agit de FAUMES et surtout des princesses SARDES et des nouvelles mariées [1]. Mais vous devez savoir aussi que je suis prête à tout et que je vous tuerai avec mon grand couteau à la plus petite infidélité, à la moindre coquetterie. Tenez-vous pour averti, moi, je me tiens aux aguets.
Ma pauvre péronnelle [2] est rentrée ce matin à la pension, non sans m’avoir fait promettre d’aller la voir dans l’espace des quinze jours : elle supplie « le bon M. Toto de lui amener sa mère au moins une fois et elle l’aimera bien de tout son cœur ». Je lui ai promis de faire la commission, tu vois que je tiens ma promesse. Si tu pouvais tenir la tienne, mon adoré et venir souper ce soir… Je fais tout préparer pour cela ; je serai bien attrapée et bien triste si tu ne viens pas. En attendant, je t’aime de toutes mes forces.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 239-240
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette


8 juillet [1844], lundi soir, 5 h. ¼

Je commence à croire que tu viendras souper, mon cher amour, mais, d’ici là, c’est encore bien long et je ne sais pas à quoi occuper mon pauvre cœur qui a tant besoin d’amour, mes yeux qui ont tant besoin de te voir, ma bouche de te baiser et ma langue de te dire de douces choses. Vraiment, je suis très malheureuse de ne savoir à quoi occuper tout cela en ton absence. J’ai déjà regardé, plus de vingt fois chacun, tes chers petits portraits et je les ai tous grondésa d’être si peu ressemblants. Je les ai baisésb malgré cet affreux défaut, mais toutes ces tendresses sont bien CHESSES quand on aime comme je t’aime. Pauvre adoré, je sais que tu travailles. Je sais que tu es mon adoré. Je sais que tu es loin de moi et que je ne peux pas vivre sans toi. Aussi, ne te préoccupec pas de mes rabacheries sans fin. Cela ne peut pas être autrement tant que je t’aimerai, c’est-à-dire tant que je vivrai. Laisse-moi donc dire et redire sur tous les tons et depuis le matin jusqu’au soir que je te désire, que je t’attends et que je t’aime. Le temps est presque aussi maussade et aussi monotone que moi. Il renverse tous les jours les mêmes seauxd d’eau sur la bosse des Parisiens, comme je redis tous les jours les mêmes stupidités à mon cher petit Toto. Nous sommes aussi drôles l’un que l’autre et je commence à trouver bon que tu restese chez toi pour nous éviter tous les deux. Hum ! Si je savais ça, comme j’irais vous chercher chez vous par les deux oreilles et sans parapluie [illis.].

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 241-242
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

a) « grondé ».
b) « baisé ».
c) « préocupe ».
d) « sceaux ».
e) « reste ».

Notes

[1À élucider.

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