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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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28 janvier [1837], samedi matin, 11 h. ½

Bonjour, mon cher petit Toto bien aimé. Le mauvais temps et le mal de tête aidant, c’est à peine si j’y vois à t’écrire.
J’ai passé une bien mauvaise nuit. À 6 h. du matin j’étais encore à jeun de sommeil : aussi je suis dans un état de malaise impossible à décrire. J’avais beaucoup souffert hier toute la soirée. C’est peut-être ce qui a été cause de cette longue insomnie. Il est possible que pour tâcher de réparer le dégât de cette nuit je reste au lit toute la journée, le temps d’ailleurs s’opposant à toute sortie.
Je t’aime mon Toto chéri, les chagrins et les tourments que j’éprouve n’en sont pas les moindres preuves. Si j’ai été injuste cette nuit, pardonnez-le moi et plaignez moi de vous aimer trop. Maintenant je voudrais baiser votre belle figure rayonnante et savoir des nouvelles de mon cher petit Toto [1]. Ayez donc la bonté de venir et le plus tôt possible pour que je sois moins triste et moins abattue que je ne le suis dans ce moment là, et vous serez un bon et adoré Toto.
En attendant je vais être bien triste et bien impatientea et je vais bien vous aimer de toute ma pauvre âme. JOUR je tache d’être GEAIE parce que je vous aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16329, f. 105-106
Transcription d’Erika Gomez assistée de Florence Naugrette

a) « impassiente ».


28 janvier [1837], samedi soir, 7 h. ¼

Non mon cher petit homme, je ne suis pas fâchée, vous êtes mon cher petit tyran et je vous aime ainsi plus que si vous étiez très bon et très soumis. Cependant je tâcherai en tirant bien fort bien fort sur mon amour de vous aimer un peu d’avantage si vous veniez de bonne heure ce soir et si vous ne faites pas le Veau Somnambule. En rentrant chez moi j’ai trouvé mon tapis de cheminée au trois quart brûlé grâce à l’intelligence de ma SERVARDE.
Comme il est en jonc j’ai le plaisir de sentir la paille brûléea à plein nez, ce qui ne me surprend que médiocrement.
Je m’amuse comme un merlan en chaise de poste, je suis geaieb comme un omnibus vide, en fin je suis aussi délirante qu’une botte trouée quand il pleut. Ah ! le bel état que celui de MILITAIRE. Ah ! le bel état que celui de CÉLIBATAIRE qui est-ce qui en veut ? j’en donne avec une remise sans écurie. Après avoir rongé mon frain [2] je ravale mon refrain et je suis aussi avancée que devant. Cependant je vous aime, je vous suis fidèle et je suis aussi bête que n’importe qui. D’où vient que tout cela ne vous amorce pas ? C’est là la question.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16329, f. 107-108
Transcription d’Erika Gomez assistée de Florence Naugrette

a) « brûlé ».
b) « geai ».

Notes

[1Le petit François-Victor Hugo est malade.

[2Erreur volontaire pour le jeu de mots avec « refrain ».

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