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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 3 décembre [18]64, samedi matin, 7 h. ¾

Pioncez, mon cher petit homme, moi je mouche pour deux. Il fait un temps exquis, hélas ! ce qui ne me permet pas d’espérer vous avoir ce soir. ALLAIE je vous pardonne ainsi qu’à votre charmant petit FIEU [1] pourvu qu’il vous revienne aujourd’hui sain et sauf au physique comme au moral. J’espère que tu as bien dormi malgré ton enchifrènement et que tu es un peu plus gaillard que moi ce matin qui n’ai fait que me moucher toute la nuit et tenir ma bouche ouverte pour tâcher de respirer. Tout cela n’a pas d’autre gravité que de me rendre un peu patraque et beaucoup plus bête encore que d’habitude, ce qui ne vaut pas la peine d’en parler.
En t’écrivant hier, j’ai oublié, dans ma préoccupation de toi, de saluer au passage l’anniversaire de notre exil [2] et de dire un adieu reconnaissant à cette pauvre treizième année qui a été pour nous, comme pour toutes les autres, clémente bonne, souriante et heureuse. Qu’elle soit bénie par nous comme l’ont été les autres et que son souvenir nous soit propice pour toutes celles à venir.
Cher bien-aimé, à défaut de baisers, hideusement contagieux, je t’envoie mon âme remplie de tous les amours et de toutes les tendresses de la terre et du ciel. Je souhaite que ton cher petit Toto [3] te revienne heureux et bien portant et je fais dans cette pensée le sacrifice d’un de mes jours avec le plus grand bonheur, sachant bien d’ailleurs qu’il me sera rendu le lendemain, ce qui diminue un peu le mérite de mon sacrifice je l’avoue mais ce qui augmente encore mon amour pour toi et mon amitié pour lui.

BnF, Mss, NAF 16385, f. 254
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Fieu : « fils » (en picard).

[2L’exil est une période bénie pour Juliette Drouet qui voit Hugo plus souvent qu’avant. Aussi a-t-elle l’habitude de saluer paradoxalement l’anniversaire du 2 décembre.

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