4 juin 1860

Guernesey, 4 juin 1860, lundi, 7 h. ½ du m[atin]

Je t’ai déjà dit bonjour des yeux et du cœur, il y a un instant, mon cher bien-aimé, quand tu as ouvert ta fenêtre ; mais cela ne me suffit pas ; il faut encore que je te fasse mon cher petit griffouillis pour être contente. J’espère que tu as passé une aussi bonne nuit que moi et que tu te portes à merveille encore comme moi ce matin. En attendant que tu me confirmes ces deux bonnes espérances, je profite du peu de soleil qu’il y a pour faire prendre l’air à mes grègues. Je crains que la journée ne soit pas bien fameuse à en juger par le froid et le brouillard de ce matin. Mais cela me serait à peu près égal si je ne sentais pas combien ta santé a besoin de beau temps pour conserver son admirable équilibre. Il faudra bien pourtant que l’été finisse par montrer le bout de son nez, ne fût-ce^a que pour faire les cornes à ce pluviard et péteux printemps. Alors nous en profiterons pour prendre la clef des champs et pour faire l’école buissonnière autant que ton travail te le permettra. Jusque là j’ai pour me rendre heureuse et pour occuper agréablement mes journées ma chère COPIRE dont j’ai commencé à reprendre possession hier. Aussi, mon adoré, pourvu que tu te portes toujours bien et que tu m’aimes, je remercie Dieu et mon bonheur est complet.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16381, f. 131
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette

a) « fusse ».