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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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27 décembre [1835], dimanche matin, 10 h. ½

Bonjour, mon adoré petit homme, comment as-tu passé cette nuit ? Quoique je le sachea, je te le demande encore, espérant que peut-être tu auras été assez bon pour ne pas travailler toute la nuit comme tu en avais l’intention. Ou bien encore que tu auras allumé un bon feu pour te tenir auprès de lui. Moi, je suis dans mon lit, ayant assez bien dormi mais j’ai encore très mal à la tête et à la gorge, mais cela se passera dans la journée.
Je pense cependant, si je souffrais et si tu venais tard me voir, je te prie, mon bien cher Victor, de ne pas chercher de raisons secrètes à ma tristesse et à mes souffrances. Si je suis malade, ce n’est pas ma faute. Si je suis triste, c’est que je ne te vois pas assez. Voilà, mon cher adoré, mes raisons les plus péremptoires et contre lesquelles il ne faut pas m’en chercher d’imaginaires.
Est-ce que tu perds tes guêtres ? Ça ne serait pas étonnant à force de courir l’immortalité comme vous faites depuis quelques jours, mon petit Toto. On perdrait bien autre chose.
Je t’aime, mon Victor chéri et adoré. Je t’aime. Je t’attends. Je t’adore. Je t’espère. J’ai du courage. Si tu viens, je serai geaie comme un pinsonb.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16325, f. 266-267
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « je le saches ».
b) « je serai geai comme un pinçon ».


27 décembre [1835], dimanche soir, 8 h. ¾

Vous êtes bien charmant, mon cher petit homme, d’être venu jeter un peu de bonheur et de gaieté sur ce dîner si triste et si froid. D’où vient que vous avez toujours l’air du grand inquisiteur chaque fois que vous entrez à la maison ? Vous en avez tout à fait le droit, mais si vous croyez que c’est là ce qui rend une femme heureuse [1].
Mon cher petit chéri, pour que vous n’ayez pas à vous étonner dans le cas où vous viendriez tout de suite, je me suis dépêchée de tout ranger car je sens bien l’impossibilité de vous rendre compte minute par minute de mon temps dans des occupations comme celles auxquellesa je suis vouée depuis plusieurs jours.
Soyez sûr que je vous aime plus qu’aucun homme, sans vous exceptéb, ne mérite d’être aimé.
Mon cher petit Toto, ce serait bien dur et bien pénible pour moi si vous ne veniez pas bientôt car je sais que vous êtes allé ici près  ? près et je sais aussi le temps d’une visite de circonstance.
Croyez-moi, cher petit homme, que je vous rendrai compte dans cette vie et dans l’autre de chacunec des secondes qui vous rapprocheront de moi. Je vous aime mon Victor. Avec ce mot-là et avec vos veilles, vos jalousies sont au moins absurdes.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16325, f. 268-269
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « auquelles ».
b) « excepter ».
c) « chaqu’une ».

Notes

[1Citation d’Angelo tyran de Padoue (réplique de Catarina à son mari).

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