Guernesey, 10 juin 1868, mercredi, 6 h. ½ du matin
Bonjour, mon grand bien-aimé, bonjour, je t’adore, sois béni. J’espère que tu as, comme moi, assez bien dormi, mais si par malheur il en était autrement, je me reprocherais de n’avoir pas su mettre mon sommeil au même pas que le tien ainsi que nous nous sommes engagés à le faire l’un pour l’autre. Tu étais triste hier, mon pauvre bien-aimé, et cela se comprend, de reste, par l’état de santé de ta chère femme. J’espère que les prochaines nouvelles que tu recevras d’elle seront moins inquiétantes et que le statu quo s’affirmera de plus en plus. En attendant, j’ai le regret de ne pouvoir rien pour te rassurer et te consoler [1]. Je ne sais que t’aimer. Hors de mon amour, je ne suis rien et ne peuxa rien. Je fais force de voile et de rame pour être prête dès à présent dans le cas où tu jugerais nécessaire de partir tout de suite. Ainsi ne te préoccupeb pas de moi de ce côté-là. Je vais dès aujourd’hui faire faire le plus gros de l’ouvrage de la maison. Je t’aime. Je t’aime. Je t’aime.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 161
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « ne peut ».
b) « préocupe ».