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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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1er mai 1840

1er mai [1840], vendredi matin, 8 h. ¾

Bonjour mon Toto chéri, bonjour mon pauvre amour. J’étais bien gentille hier au soir n’est-ce pas ? J’étais assommée par le mal de tête, je ne pouvais ni veiller ni dormir, j’étais dans un état hideux et dont je te demande bien pardon, mon cher adoré. Je me suis levée de bonne heure ce matin, j’ai voulu auparavant de t’écrire compter ma dépense du mois d’avril, je me trouve avoir dépensé 10 F. 8 sous de plus que je n’ai reçu d’argent ou du moins de plus que je n’en ai écrit, mais c’est que j’aurai oublié d’écrire un jour l’argent que tu m’auras donné, voilà tout. Je t’aime mon pauvre amour. Je suis vraiment honteuse de ma conduite d’hier. J’aurais coupé un de mes doigts pour pouvoir sortir de cet engourdissement douloureux. Ce matin je suis comme une femme à qui on aurait fait prendre un narcotique, je suis toute hébétée et toute fatiguée de mon mal de tête. Je vous aime mon petit homme, je vous aime de toute mon âme, vous êtes mon cher adoré bien-aimé. Il fait un temps doux et frais ce matin et dont j’aimerais à profiter avec vous sur quelquea impériale de diligence en pleine grande route avec le déjeuner de 1 h. après midi à l’horizon. Hélas ! Quand ce bonheur  ? Au train dont tu travailles je ne vois pas notre voyage très prochain. Encore un volume ? Oh ! là là, oh ! là là. Je n’aime pas assez mon prochain pour me résigner à leur servir des livres admirables et dignes du bon Dieu aux dépensb de ma vie, de mon âme et de NOTRE bonheur. Je voudrais être partie avec toi bien loin et pour bien longtemps.

Juliette

BnF, Mss, NAF, 16342, f. 95-96
Transcription de Chantal Brière

a) « quelqu’ ».
b) « au dépend ».


1er mai [1840], vendredi soir, 6 h. ½

Mon Toto chéri, vous ne venez pas souvent. Que vous arrive-t-il donc ? Hier j’ai à peine eu la force de savoir que vous étiez auprès de moi et de m’en réjouir tant je souffrais, et voilà qu’aujourd’hui je suis touta amour depuis les pieds jusqu’à la tête et où je vous désire de toute mon âme vous ne venez pas, c’est bien vilain et bien méchant. J’ai fait venir Claire de bonne heure pour profiter de ta bonne volonté dans le cas où tu voudrais nous conduire au feu d’artifice. Pour que tu ne l’oublies pas je te rappelle dans cette lettre que Claire s’en va demain matin de très bonne heure et que rien ne peut s’opposer à ce que tu viennes déjeuner avec moi. Je sais bien que sa présence n’est pas un empêchement, du moins je l’espère, mais enfin je te dis cela pour t’encourager à me donner cette joie dont tu es si avare depuis longtemps. Claire a écrit ce matin à M. Pradier à l’occasion de sa fête une lettre que Lanvin s’est chargé de lui remettre en main propre ainsi que la note du dernier trimestre. La pauvre enfant travaille d’arrache-pied depuis hier. Il faudra que tu lui donnes quelques petits CHOUX [1] si tu en as dans ta poche. Tu te souviens que nous ne lui avons rien donné la dernière fois qu’elle est venue.
Je t’aime mon Toto. Je t’aime mon amour, je te désire mon petit homme.

Juliette

BnF, Mss, NAF, 16342, f. 97-98
Transcription de Chantal Brière

a) « toute ».

Notes

[1Déformation phonétique de « sous ».

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