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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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19 mars 1838

19 mars [1838], lundi midi

Bonjour, mon petit homme chéri, bonjour, mon adoré. Je ne te demande pas comment tu as passé ta nuit, je sais d’avance que c’est à travailler comme un pauvre chien. Pourvu que tes yeux ne soient pas plus malades, je serai tourmentée jusqu’à ce que je t’aie embrassé. Je vais prendre un bain, j’en avais commandé un dans le cas où je serais seule ce matin. Il vient d’arriver tout à l’heure et je vais le prendre. Si vous avez de l’instinct, vous viendrez m’en tirer. Jour, mon petit o, jour, mon gros To. A propos, as-tu été mouillé cette nuit ? Pleuvait-il ? J’y ai pensé aussitôt que tu as été parti, je regrettais de ne pas avoir regardé le temps avant de te laissera sortir de la maison. L’excès même de ma préoccupation de toi et de mon amour fait que je manque aux choses les plus essentielles. Je voudrais te voir, mon cher adoré, pour être sûre que tu te portes bien et puis pour te baiser sur tes lèvres roses. Je t’aime de toute mon âme, je t’aime de toutes mes forces, bonjour, mon adoré, bonjour, ma joie. Pense à moi, aime-moi, tu ne feras que me rendre ce que je te donne sans restriction et de tout mon cœur.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16333, f. 164-165
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

a) « laissé ».


19 mars [1838], lundi après-midi, 4 h. ¾

Je tiens à vous payer ma dette, mon Toto, j’ai toujours payé celle qu’on paye avec de l’amour, vous en savez quelque chose, car c’est moi qui depuis longtemps vous faisa crédit. J’attends toujours le jour où vous vous exécuterez, et ce jour sera beau car vous avez un fameux arriéré avec moi. Je voudrais bien savoir où vous êtes à présent et ce que vous faites. Je voudrais savoir si vous pensez à moi et si vous m’aimez. Je voudrais baiser vos yeux pour les guérir et votre bouche pour mon plaisir. Vous ne savez pas, mon Toto, combien elle est voluptueuse votre belle bouche et quel parfum nourrissant elle exhaleb et vous ne pouvez pas savoir non plus mon délire et mon enivrement quand je suis dans vos bras. Mon Victor adoré, je vous aime, je voudrais avoir plusieurs bouches pour vous le dire et encore ce ne serait point assez pour mon âme. Je t’aime trop. Je t’adore. Je ne pense qu’à toi. Je suis folle. Bonjour, ma joie, bonjour, ma vie. Reviens bien vite si tu m’aimes. J’ai besoin de vous baiser depuis la tête jusqu’aux pieds et depuis les pieds jusqu’à la tête par devant et par derrière. N’oubliec pas que je veux aller demain à Marion si on la donne et que je ne veux pas en manquer une seule représentation. Je voudrais bien savoir quelle est l’invitation que vous avez faite à M. [illis.] pour mercredi prochain. Tout le monde vous a, excepté moi, c’est bien triste à penser que celle qui ne vit qu’en vous et pour vous est précisément celle que vous négligez et que vous oubliez. Ce ne sont pas des mots vides de sens que je dis là, c’est la triste et vraie vérité. Aussi quand j’y pense, je suis découragée et malheureuse et je donnerais ma vie pour une [ épingle  ?]. Pourquoi donc ne m’aimes-tu que pour le dévouement et non pour l’amour ? Moi, je t’aime de toutes façons et de tous les amours. Quel bonheur ce serait pour moi de t’inspirer ce que je sens : l’amour passionné, l’amour sans borne, l’amour sans partage. Hélas ! Jamais je n’y arriverai...

Juliette


BnF, Mss, NAF 16333, f. 166-167
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

a) « fait ».
b) « exale ».
c) « oublies ».

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