Guernesey, 8 novembre 1862, samedi, 8 h. du m[atin]
Bonjour, mon cher petit matinal, bonjour, que mon amour soit avec toi et avec ton esprit, je t’adore. Comment as-tu passé la nuit, mon cher petit homme ? Mieux que la précédente, n’est-ce pas ? J’espère que ces vilaines interruptions de sommeil ne se sont pas reproduites cette nuit. Cela est d’autant plus nécessaire que tu te lèves maintenant avec l’aube. Et à ce sujet je trouve que tu as bien fait de ne pas mettre ton lit à l’air, c’est-à-dire au brouillard. Quant à moi, j’ai encore toutes mes fenêtres fermées et je ne les ouvrirai que lorsque le temps sera tout à fait débrouillassé. Jusque là je me tiens close comme une huître… que je suis. Ça n’est pas une raison pour vous ficher de moi ; et puis d’ailleurs [ça] M’EST EGAL, j’ai de quoi me consoler en pensant à mon festival de ce soir. Je m’en goberge, je m’en héberge, je m’en flamberge, je m’en asperge d’avance de mon bonheur : quel bonheur !!! C’est le cas de dire et de répéter que : abondance et TOTOS ne nuit pas… à la joie AU CONTRAIRE. Donc à ce soir et vive l’amour ! Jusque là pensez à moi mais ne m’oubliez pas. Je t’aime.
Juliette
BNF, Mss, NAF 16383, f. 234
Transcription de Camille Guicheteau assistée de Guy Rosa