Guernesey, 26 juillet 1862, samedi, 7 h. du m[atin]
Bonjour, mon grand adoré, bonjour, beau jour et bonheur. Je t’aime splendidement comme le soleil de ce matin.
J’espère que tu as passé une bonne nuit et que tu ne te sens pas trop fatigué de ton rangement ? Quant à moi, je me couche avec le mal de tête, je dors avec le mal de tête et je me lève avec le mal de tête et je ne m’en porte pas plus mal, AU CONTRAIRE. Je compte sur le voyage pour faire quelque diversion à cette habitude folâtre. En attendant, j’entasse bas sur chaussettes et chemises sur mouchoirs ; cependant, jusqu’à présent, tu ne m’as apporté qu’un habit, un pantalon et quelques chaussettes. Je voudrais bien que tu fisses compléter ta garde-robe LE PLUS TOT POSSIBLE pour que je puisse commencer à faire ma malle et le sac de nuit. Il serait fâcheux de me laisser tout à faire à la dernière minute. Je sais que je t’embête mais ce n’est pas de ma faute. Une fois en route, nous ne songerons plus qu’à être heureux ; mais, d’ici là, il faut trimer et m’aimer. Je vous l’ordonne.
BNF, Mss, NAF 16383, f. 191
Transcription de Camille Guicheteau assistée de Guy Rosa