Paris, 10 mai 1882, mercredi matin, 7 h. ½
C’est toujours avec un peu d’inquiétude, mon grand bien-aimé, que je te vois sortir de tes habitudes régulières et tranquilles. Cependant j’espère que cette nouvelle infraction à ta règle de conduite quotidienne ne te fera pas de mal et ne te fatiguera pas trop ce soir. Quant à moi, j’éprouve comme une sorte de sécurité tant que je ne te perds pas tout à fait de vue, aussi je te remercie, à nouveau, et de tout mon cœur, de me permettre de te conduire à ce banquet [1] et d’attendre en voiture à la porte jusqu’à la fin du dernier toast pour te ramener sain et sauf chez toi. Ce n’est peut-être pas bien le moment de te rappeler que tu n’as pas encore répondu ni envoyé d’argent à Mme Chenay [2] et que nous sommes déjà au dix de ce mois. La pauvre femme ne doit pas savoir ce que cela veut dire ni comment se tirer d’affaire pour les besoins quotidiens de ta maison. Tâche de trouver un moment pour lui écrire et pardonne-moi mon insistance qui est encore une forme de mon amour et de ma vénération pour toi. Je t’adore.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16403, f. 79
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette
[Souchon]