Guernesey, 14 fév[ier] [18]63, samedi après-midi, 1 h.
Plus la date sacrée [1] se rapproche de nous, mon cher adoré, et plus je me sens envahie par une émotion religieuse comme si la porte de notre paradis d’amour allait se rouvrir pour nous pour ne plus se fermer. Mon âme chante en moi le cantique céleste de mon bonheur passé et tout mon être te bénit et te glorifie comme ce qu’il y a de meilleur et de plus parfait parmi les hommes. Les mots me manquent, mon adoré bien-aimé, et les larmes me viennent aux yeux de mon impuissance mais je t’aime, je t’aime, je t’aime ! Je regrette de ne pouvoir pas profiter du beau temps et de ta bonne volonté aujourd’hui, mon doux bien-aimé, mais les jours de FESTIVAUX cela ne m’est vraiment pas possible. Quand j’aurai une suppléante, si jamais j’en ai une, je pourrai prendre mon bonheur en tout temps et à toute heure. Jusque là il faut que je fasse MON SERVICE coûte que coûte trop heureuse quand j’en viens à bout. Aujourd’hui j’ai encore bien des choses à faire et c’est pour cela que je me dépêche de te donner mon cœur d’un seul morceau et dans un seul mot : je t’adore.
BnF, Mss, NAF, 16384, f. 40
Transcription de Chantal Brière