Guernesey, 3 janvier 1858, dimanche après midi, 2 h.
J’espère, mon petit homme, que tu n’as pas fait l’imprudence d’aller errer sur la colline par ce temps de brouillard et de froid. J’espère encore que tu vas venir te chauffer auprès de mon feu, c’est pour cela que je me hâte de te gribouiller ma restitus pour te laisser la place entièrement libre. Je viens, à ton intention, d’affiler avec mes ciseaux le bec de toutes les plumes écrabouillées sous toi. Puis, j’ai donné audience à la petite Préveraud et à sa bonne, lesquelles venaient chercher leur beurre. Il paraît que Mme Préveraud et sa petite fille viendront avec Terrier dîner mercredi.
Je profite, quel profit ! de ton absence, mon bien-aimé, pour achever mon gribouillis. Ce que j’ai à te dire, tu le sais d’avance aussi bien que moi. Ce n’est donc pas dans le but de te rien apprendre de nouveau que je te répète que je t’aime et que je n’ai de bonheur qu’en toi. Reviens bien vite, mon bien-aimé, et je serai heureuse.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16379, f. 5
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette