Paris, 7 janvier [18]78, lundi soir, 4 h. ½
Te voilà arrivé, à la fin du jour, mon pauvre bien-aimé, mais non à la fin de ta journée qui se prolongera encore bien au-delà. Heureusement que tu as la santé en proportion de ton génie et ce qui tuerait un titan s’il y en avait encore échoué devant ta force surhumaine. C’est ce qui me rassure et m’émerveille en même temps de te voir accomplir les travaux les plus formidables en conservant ton inaltérable santé et ta sérénité sublime. Je bénis Dieu et j’ai le cœur rempli de reconnaissance et d’amour.
Je sais que tu as reçu une visite tout à l’heure mais je me suis bien gardée d’y paraître car je suis faite comme la poupée du diable n’ayant pas encore eu le temps depuis ce matin de m’occuper de moi. À ce propos je te donne grosso modo l’emploi de l’argent que tu m’as donné depuis le jeudi 4 jusqu’à aujourd’hui 7. Tu verras que sans compter les menus faux frais de lettres, etc. j’ai dépassé de 21 [f ?] la somme réglementaire que tu me donnes jour par jour ce qui fait que je suis en retard avec ma cuisinière, après cela je m’en fiche et voilà. Je t’adore, mets ça dans ton cœur si tu peux et si tu l’oses.
BnF, Mss, NAF, 16399, f. 6
Transcription de Chantal Brière