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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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6 décembre [1838], jeudi, midi ¼

Bonjour, mon petit bien-aimé, bonjour ma joie et ma vie, bonjour mon petit adoré. Si tu viens me chercher je serai prête tout de suite parce que je ne m’habillerai pas. Sinon, je vais me peigner à fond et faire les cent coups sur mon individu. J’espère que tu souperas avec moi ce soir, aussi je ferai dîner tous mes goistapious et je me réserverai pour vous tenir compagnie, mon cher petit homme. Je te remercie, mon adoré, de ce que tu fais pour les Lanvin, ce sont de très belles étrennes en ce sens qu’ils sont très malheureux et que de l’argent comptant leur sera d’un très grand secours. C’est une bonne action de toute façon. Si tu pouvais parvenir à ce qu’on fasse un triage des vieux effets dans ta maison pour leur donner quelques vieilles nippes d’ici à l’année prochaine, ça ferait très bien dans leur pauvre paysage. Je m’en rapporte à toi au reste pour faire tout ce qu’il faut et tout ce que tu pourras. Tu es ma providence et mon cher petit bien-aimé et je t’adore malgré l’esprit de Mme Potel [1]. En voilà une affreuse limace luisante et baveuse, pouah la cochonne. Je t’aime, voilà qui est bon et frais comme ta charmante figure.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 206-207
Transcription de Sophie Gondolle assistée de Gérard Pouchain


6 décembre [1838], jeudi soir, 11 h.

Je suis seule, mon Toto, c’est-à-dire avec ma fille, et je m’empresse de vous écrire votre petite lettre. Je voudrais trouver des expressions gaies afina de ne pas t’ennuyerb, malheureusement tout ce que je t’écris vient de mon cœur et depuis longtemps il est malade et triste. Par exemple crois-tu mon pauvre adoré que c’est un moyen efficace que de me donner pour raison de santé et de sollicitude pour moi ce qui n’est qu’exigences et devoirs de famille ? Quand je dis devoirs et exigences de famille j’entends parler des tiens car pour moi je n’ai qu’un devoir, celui de t’aimer, qu’une famille, toi. Si tu savais le mal que tu me fais quand tu essaies de me donner le change sur tout ce qui intéresse notre amour et mon bonheur, tu en serais effrayé et tu ne recommencerais jamais. Maintenant, mon amour, que j’ai laissé le cœur se plaindre, je vais donner le tour à l’amour, c’est bien le moins car je ne souffre que parce que je t’aime et je ne suis heureuse qu’à cause que je t’aime. Je t’aime : c’est toute ma vie et plus que ma vie car je sens au-delà de ma pauvre nature. Je t’aime, mon Toto. Tâche que je puisse te le dire bientôt.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 208-209
Transcription de Sophie Gondolle assistée de Gérard Pouchain

a) « à fin ».
b) « ennuier ».

Notes

[1Juliette évoque dans les jours suivants cette marchande qui lui réclame de l’argent.

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