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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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31 octobre [1838], mercredi matin, 11 h. ½

Bonjour mon cher petit homme, bonjour mon cher petit bien-aimé. Vous ne vous attendiez pas sans doute à ce que je vous fasse compliment de votre exactitude à remplir vos promesses ? Même quand vous êtes jaloux, vous ne venez pas ? C’est gentil !
Il fait un temps ravissant et ce Joly est bien ridicule de n’avoir pas déjà donné la pièce depuis quinze jours. Au moins j’aurais eu quelque chance d’aller avec vous revoir nos anciennes chambres à coucher, nos jardins, nos parcs, et toutes nos ex propriétés, tandis qu’à cause de lui peut-être, je suis réservée aujourd’hui et les autres jours à vous attendre 23 h. ½ / 24, seule et toujours seule.
Il fait cependant bien beau, quel dommage que vous soyez si occupé. Je vais broyer des pavots ce soir, par la même occasion je broierai du noir, et je tâcherai d’être couleur de rose quand je vous verrai.
Papa est bien i, papa est bien bête de n’être pas revenu cette nuit.
Je baise mon petit homme des toutes mes forces, et je l’aime de tout mon cœur. Je voudrais bien le voir tout de suite un peu.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 106-107
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette


31 octobre [1838], mercredi soir, 9 h. ½

Je t’écris, mon bien-aimé, la tête bourrelée et fatiguée de ces hideux comptes de fin de mois. J’ai recommencé sur trois feuilles de papier différentes, et le résultat de toute cette peine, c’est que j’ai 21 F. 8 sous de déficit à mon désavantage précisément.
J’avais trouvé 34 F. 1 sou 3 liards de déficit à mon avantage, mais il est vrai de dire que j’avais oublié les 55 F. 10 sous de M. Pradier et la timbale de Claire. Maintenant j’y renonce. Je ne sais pas où est passé cet argent. Ce qu’il y a de bien sûr, c’est que je ne l’ai pas mis dans ma poche, ni d’une façon, ni de l’autre, mais c’est toujours bien embêtant de prendre tant de soin pour écrire toute la dépense et toute la recette, et d’y réussir si peu.
J’ai mal à la tête, j’ai mal aux nerfs, je suis horriblement agacée, vexée, et fatiguée. J’aurais bien besoin à mon tour d’une lettre de vous pour me remonter un peu. Pour un rien je jetterais le manche après la cognée, l’amour, la fidélité et la probité et toutes les autres vertus ne rapportenta pas un centime de bonheur dans la vie d’une pauvre femme comme moi.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 108-109
Transcription d’Élise Capéran assistée de Florence Naugrette

a) « rapporte ».

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