Guernesey, 12 août 1857, mercredi matin, 7 h. ½
Bonjour, cher bien-aimé, BON jour, BEAU jour, bon amour, bonheur pour toi aujourd’hui. La journée se prépare charmante et j’espère que rien ne s’opposera à ce que tu sois heureux depuis le premier moment où tu ouvriras les yeux jusqu’au moment où tu te coucheras ce soir. Quant à moi, je ferai tout mon possible pour que rien ne manque à ton cœur et à ton âme. Que le bon Dieu en fasse pour toi seulement la moitié autant et tu n’auras rien à désirer en ce monde. Sans compter l’allègement de ton coche par le départ de tes AUTRES [1] et l’arrangement plus que probable, à l’amiable, de l’affaire CHIEN [2]. L’Alcibiade Charles pourrait se dispenser de ce moyen enragé d’attirer l’attention des Athéniens guernesiais, à moins que ce ne soit pour leur prouver une fois de plus que les bêtes se mangent entre elles. En attendant, mon grand adoré, je te souris à travers ton sommeil pour en chasser toutes les ombres de la veille. Quand je te verrai je te baiserai de fond en comble pour te rendre invulnérable de corps et d’esprit contre tous les petits tracas physiquesa et moraux de la vie. À bientôt, n’est-ce pas, mon cher petit homme ? à ce soir notre petit régal et à vendredi notre grande razzia de viers coffres et notre Fantasia de cobourgs [3].
Juliette
BnF, Mss, NAF 16378, f. 150
Transcription de Chantal Brière
a) « phisiques ».