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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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11 août [1838], samedi matin, 10 h.

Bonjour, mon cher petit bien-aimé, bonjour. As-tu fini mon petit homme adoré pour que je puisse me réjouir et espérer te voir bientôt dans mes bras ? Malheureusement notre bonheur ne sera que de très courte durée mais c’est déjà tout que d’en avoir un petit morceau. Je tremble de m’engager ou plutôt de t’engager avec ce hideux sourd qui n’entend pas plus son intérêt que la parole humaine. Oh ! Mon Dieu ! Dans quel affreux guêpier t’ai-je fourré ? Si je pouvais m’en vouloir d’une chose que je n’ai pas prévue, je ne me pardonnerais de la vie mais je suis aussi innocente et aussi frappée que toi quoique je sois la cause de notre mésaventure. Après cela peut-être serons-nous agréablement attrapésa et ferons-nous élever un monument de reconnaissance au GRAND JOLYb. Ceci n’est qu’une faible esquisse de ce que notre enthousiasme lui prépare. Je ris du bout des lèvres car rien n’est moins risible que ce qui s’apprête à ce théâtre. Le Bon Dieu nous devrait bien de la faire réussir, pour nous dédommager de toutes les venettes qu’il nous cause avant son ouverture. Je t’aime, mon cher petit homme, tu ferais bien de venir me dire si tu as fini la dernière scène. Je t’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16335, f. 159-160
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain
[Souchon]

a) « attrappés ».
b) Dessin du « monument de reconnaissance » pour le directeur du Théâtre de la Renaissance, Joly :

© Bibliothèque Nationale de France

11 août [1838], samedi soir, 6 h.

Il paraît, mon cher petit bien-aimé, que tu n’as pas encore fini la fameuse dernière scène ? ou bien que tu as eu beaucoup de visites et d’affaires puisque je ne t’ai pas vu de la journée ? Je ne me plains pas mais comme à l’ordinaire, je te désire de toutes mes forces. J’ai eu tantôt la visite de l’insignifiante Mme Guérard qui venait me demander une loge pour voir ANGELO demain. Je lui ai dit que c’était impossible et que probablement je ne te verrais que ce soir fort tard. Je ne savais pas si bien dire ou plutôt si MAL dire. J’ai toujours très mal à la tête, il est vrai que je fais tout ce qu’il faut pour cela : ne pas sortir, ne pas voir son Toto, ne pas… En voilà trois fois plus qu’il n’en faut pour avoir des maux de tête stupides. Sitôt que vous aurez réellement et entièrement fini, je vous prends et je ne vous quitte plus. Il y a trop longtemps que je suis au régime du pain SÈCHE et la légume cuite à l’eau. J’ai besoin de me RESTAURER et vous serez mon RESTAURATEUR. Je t’aime, je suis triste, embêtée mais je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16335, f. 161-162
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

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