Paris, 19 juillet [1880], lundi matin, 11 h.
Si tu es content de ta nuit, je suis ravie de la mienne. Si tu m’aimes, je t’adore. Voilà la proportion. J’espère que nous sommes enfin débarrassés des lessives quotidiennes du vieux Médard [1] et que nous pourrons rôtira à notre aise après avoir bouilli si longtemps. Dès ce matin le sénateur Leblond demandait à te parler… d’urgence. Ne pouvant pas venir le soir il doit venir tantôt à deux heures après ton déjeuner. Je croyais que, les chambres étant en vacances, la politique devait nécessairement chômer. Il paraît qu’il n’en estb rien. Quant à moi cela ne m’empêche pas de te faire souvenir que c’est aujourd’hui la blanchisseuse. J’ai déjà acheté et payé ce matin à Virginie 18,90 de bougiec sur l’argent de la maison c’est te dire qu’avec la recette pour la dépense d’aujourd’hui je suis tout à fait à sec. Maintenant que j’ai tout dit je reviens à mon mouton qui bêle ceci : je t’adore.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16401, f. 193
Transcription d’Emma Antraygues et Claire Josselin
a) « rôtirs ».
b) « n’en n’est ».
c) « boujie ».