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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 juillet [1844], jeudi matin, 11 h. ¼

Bonjour, mon Toto bien aimé, bonjour, mon adoré petit homme, bonjour, comment que ça va ce matin ? Tu m’as quittée bien vite hier, mon bien-aimé, et tu n’es pas revenu ce matin malgré tes promesses réitérées. Pauvre adoré, je ne peux pas t’en vouloir parce que je sais que tu travailles nuit et jour mais je te regrettea et je te désire de toutes mes forces. Tu iras sans aucun doute à l’Académie, aujourd’hui, je voudrais bien que tu puissesb venir, en passant, baigner tes yeux et m’embrasser une pauvre petite fois en même temps. Le temps est bien vilain, c’est peut-être ce qui me donnait ce mal de tête atroce hier. Ce matin, je me sens moins prise qu’hier. Malheureusement, tu ne viens pas et je ne pourrai pas profiter de mon mieux.
Qu’as-tu fait de ta lavande ? Il ne faut pas laisser toute cette énorme botte dans la même pièce car tu t’asphyxieraisc ; il faut la diviser par brins et la mettre où tu as des étoffes de laine. Divisée dans tout l’appartement, cela parfume et assainit l’air mais il ne faut pas trop en mettre, surtout dans la chambre dans laquelle tu couches.
Jour Toto, jour mon cher petit o, je vous aime, et vous ? Je vous désire, et vous ? Je vous adore et vous ? Tu es ma vie et ma joie, mon Victor.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 225-226
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

a) « regrettes ».
b) « puisse ».
c) « asphixierais ».


4 juillet [1844], jeudi soir, 6 h. ¾

Est-ce que, par hasarda, tu aurais l’atrocité de ne pas venir avant le dîner ? Ça serait gentil. J’en ai bien peur car voilà l’heure presque passée. C’est une jolie journée que tu me donnes là ; il est vrai que, comme compensation, tu me promets d’être un jour entier sans venir du tout ! Et puis encore, il faut que je sois bien contente, bien heureuse et que je rie aux éclats. Voime, voime, prends garde de le perdre, vieux méchant, et tu n’iras pas de travers. Eh ! Bien comment t’es-tu tiré de ton armoire de fer ? As-tu bien monthyonné [1], de carton, avec ta morale et tes fautes de français ? J’aurais donnée deux sous de bon cœur pour te voir patauger dans les cuirs et dans les vertus des susdits candidats. Quel dommage que ces séances-là ne soient pas publiques ! Comme j’irais, comme je tricoteraisb et comme je siffleraisc le dernier président du dernier trimestre. Dieu de Dieu, comme je m’en donnerais, comme je me vengerais, comme je vous [Houspillerais ?]. Aussi, vous n’avez garde d’aventurer vos perruques AVENTURINES à l’admiration des passants quand vous faites des choses comme cela. C’est prudent mais c’est dommage. Baisez-moi, cher scélérat, tout cela ne me console pas de ne pas vous voir, au contraire.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16355, f. 227-228
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette

a) « hazard ».
b) « tricotterais ».
c) « siflerais ».

Notes

[1Néologisme formé sur « Monthyon », nom d’un prix de vertu.

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