Guernesey, 19 mars 1859, samedi, 8 h.
Bonjour, mon cher bien-aimé ; bonjour avec le doux souvenir de notre charmante petite promenade d’hier. Il me semblait que la sève de mon cœur était à l’unisson du printemps et que mon amour s’épanouissait en vertes tendresses et que mon âme nageait en plein renouveau de bonheur. Il faudra que nous reprenions au plus tôt et d’une manière plus suivie nos douces habitudes d’autrefois, mon cher bien-aimé ; pour cela, il faut que tu achèves ton livre car il n’est guère possible que tu te déranges de ton travail dévorant au moment surtout où tu achèves ton œuvre. Cela donnera le temps aux giboulées de tomber et au soleil de s’asseoir plus carrément dans le ciel de Guernesey. Du reste, voici les corvées obligatoires terminées ; maintenant, quand nous prendrons de la poudre d’escampette, ce sera tout à fait pour nous et non pour les deux ou trois petits bourgeois qui veulent des VISITES pour n’en savoir que faire.
À BÊTOT, mon cher adoré, je te souris, je t’aime, pense à moi et aime-moi.
BnF, Mss, NAF 16380, f. 73
Transcription de Mélanie Leclère assistée de Florence Naugrette