Guernesey, 26 octobre [18]68, lundi, 7 h. ¼ du m[atin]
Bonjour, mon cher petit bien-aimé, bonjour. Je vois par ton signal [1] que tu as eu une meilleure nuit qu’hier, ce dont je te félicite et moi aussi, et doublement, même, puisque je peux ajouter ta bonne nuit à la mienne. Oui, malgré les atroces tiraillements de mon bras, j’ai pu dormir plusieurs heures de suite, ce qui ne m’était pas arrivé depuis longtemps. En ce moment, je souffre comme une enragée et ma main droite est si enflée que je peux à peine tenir ma plume ; mais je m’en fiche parce que c’est le jour et que je peux me tordre à mon aise. Pourvu que je te sente bien portant, je suis tranquille et je remercie Dieu. Est-ce aujourd’hui que nous reprenons la collation [2] ? Je le saurai si tu apportes ton manuscrit tantôt. Jusque-là, je n’ose pas trop y compter mais je t’adore encore plus pour me faire prendre patience.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 294
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette