Paris, 11 juin [18]74, jeudi soir, 6 h.
Tu as raison, mon grand adorable bien-aimé, de me recommander la sagesse, la confiance et le calme, pas celui de l’Anglois : du calme, du calme, du calme [1], mais celui d’une femme qui se sent aimée autant qu’elle aime. C’est ce que je vais mettre en pratique ce soir même en dépit de toutes les favoritesa passées, présentes et futures. Tu verras avec quelle superbe crânerie je supporterai ce nouvel assaut de ton cœur. En attendant, je lutte d’amour et de chaleur intérieureb et extérieurec. J’ai vu tout à l’heure mon pauvre Louis [2] qui va de mal en pire, ce qui commence à m’inquiéter un peu. J’espère, pourtant, que, la jeunesse aidant, avec le repos prochain des vacances, il finira par triompher de tous ses bobos. Jusque-là, il s’impose, non sans regret, la privation de l’honneur de te voir, ce qui est pour lui et pour sa femme un vif chagrin que je comprends et que je partage avec eux. Ces pauvres enfants n’ontd vraiment pas de chance. Aussi je les plains autant que je les aime. Je n’ai pas revu Mme Chenay [3] ni la Petite Jeanne depuis tantôt, mais je sais que ton Petit Georges va de mieux en mieux, ce qui suffit, avec la certitude de te revoir bientôt, à mon bonheur.
BnF, Mss, NAF 16395, f. 106
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette
a) « favories ».
b) « intérieur ».
c) « extérieur ».
d) « non ».