Paris, 13 mai 1881, vendredi matin, 8 h.
Cher bien-aimé, les jours se suivent et ta gloire augmente à chaque aurore ; je voudrais qu’il en fût de même de tes bonnes nuits et de ta chère santé ! J’espère que, le soleil aidant, je n’aurai bientôt plus rien à désirer de ce côté là.
En attendant voici une lettre de ton collègue au Sénat, M. Merlin, maire de la ville de Douai, qui t’annonce que le conseil municipal de cette ville a voté à l’unanimité de donner ton nom à la principale rue de leur cité : suit l’arrêté aux armes de la ville imprimé en gros caractères et signé par Grévy, Président de la République, sur la proposition du Ministrea Constans [1] du 29 mars dernier. Cet hommage d’une ville et même de deux villes, Douai et Besançon, sans compter Paris qui les représente toutes [2], va être suivi par toutes les autres villes de France, chacune en son privé nom et honneur. Ce n’est que justice, mon grand, mon sublime bien-aimé, et l’univers tout entier s’associera à ce témoignage d’admiration que tout le monde civilisé te doit. Je suis heureuse et fière de sentir mon cœur battre à l’unisson de l’enthousiasme et de l’amour universel. Je regrette seulement de ne savoir pas mieux l’exprimer, mais si le style me manque, l’adoration de mon âme pour toi n’en est que plus ardente.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 101
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette
a) « ministres ».