Paris, 11 février 1881, vendredi matin, 8 h. ½
J’espère, mon grand petit homme, que tu n’auras pas lieu de te plaindre de ta nuit ni de ta matinée aujourd’hui car il me semble que, outre le pionçage auquel tu te livres en ce moment, tu as assez bien dormi cette nuit. N’était un mal de tête carabiné qui me tourmente ce matin, moi non plus je n’ai pas à me plaindre de ma nuit.
En même temps que la lettre de Bruxelles, pareille à la mienne, et pour laquelle aussi tu as signé le reçu pour le facteur, tu as une grosse lettre de Rothschilda toute remplie de chiffres. Je te les remettrai toutes les trois : la mienne, la tienne et celle de Rothschilda dès qu’il fera jour chez toi. Autre guitare, pas de Sénat d’ici à lundi prochain ; séance publique à deux heures ; tirage au sort des bureaux et seconde délibération de la proposition Jules Favreb sur les tutelles [1]. Pendant que j’y pense, je te propose de faire tailler ta barbe et tes cheveux avant le renvoi définitif de mon irascible perruquier. Tu me diras le jour et l’heure exactsc pour que je l’en avertisse. En attendant je te fais souvenir que tu as trois personnes à déjeuner ce matin qui sont : Méaulled, Barbou [2] et Manet [3]. Tu serais bien gentil de presser un peu ta toilette pour pouvoir arriver à temps pour déjeuner avec eux. Je crois savoir que tout le charmant groupe de là-haut déjeunera à midi et demi précisese. Quant à moi, j’y serai militairement comme c’est mon devoir, et avec tout mon cœur parce que ce sera mon bonheur… si tu y es.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16402, f. 23
Transcription de Caroline Lucas assistée de Florence Naugrette
a) « Rosthchild ».
b) « Favres ».
c) « exact ».
d) « Méaule ».
e) « précis ».