Villequier [1], 14 septembre [18]79, dimanche matin, 9 h.
Cher bien-aimé, je sais que tu as aussi bien dormi que moi cette nuit, ce qui n’est pas peu dire. On nous fait la vie si heureuse ici que tout nous devient facile, même le sommeil que nous avions perdu depuis si longtemps. Puisse-t-il nous suivre à Paris après que nous aurons quitté nos chers et charmants hôtes, je le désire et je l’espère. En attendant je t’envoie deux bonnes petites lettres de tes petits-enfants avec un mot de leur mère qui te donne son adresse à Venise Hôtel d’Angleterre. Elle ne dit rien de la santé de son mari peut-être parce qu’elle n’a rien de bon à en dire. Les enfants disent, eux, qu’ils iront à Naples si le séjour de Venise est contraire à Lockroy [2]. Moi je pense que le mieux pour lui et pour ton cher petit groupe et pour toi serait de revenir le plus tôt Avenue d’Eylau 130 [3]. C’est encore là qu’il a le plus de chance de retrouver la santé au lieu de courir après à la voile, à la rame et par monts et par vaux, comme il le fait depuis un mois sans aucun succès. À ce propos je te fais souvenir que tu as plusieurs lettres à répondre : celle du Havre et celle de Saint-Valerya. Je te prierai tantôt de me dire, à moi, si je dois continuer de m’abstenir de faire ma pieuse visite [4] que je continue à remplacer par la prière dans mon for intérieur tous les jours en ton nom et au mien. J’attends ton conseil en t’adorant.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16400, f. 218
Transcription d’Apolline Ponthieux assistée de Florence Naugrette
a) « Saint-Valry ».