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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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25 octobre [1847], lundi matin, 8 h.

Bonjour, mon adoré, bonjour. Je sais maintenant pourquoi je ne t’ai pas vu cette nuit, et j’en suis furieuse. D’abord parce que je n’aurai pas profité de la peine que tu as prise de venir me voir au milieu de la nuit malgré le froid et la pluie ; ensuite parce que je crains que le même obstacle ne se reproduise. Voilà ce que c’est : – de hideux gamins se sont ingérés hier de détraquer la broche de la serrure dans laquelle entre la clef, de sorte qu’extérieurement il est impossible de se servir de la serrure. Comme cela n’a rien dérangé au jeu même de la serrure, Suzanne ne s’est aperçue de rien hier au soir en fermant sa porte. Ce n’est que ce matin, lorsqu’elle est revenue de chez le boulanger, qu’elle a vu qu’elle était à la porte. Le serrurier va venir tout à l’heure arrangera ce dégât, mais il ne me rendra pas mon bonheur perdu de cette nuit et il n’empêchera pas que cela ne recommence au moment où on s’y attendra le moins. Cette pensée m’inquiète et m’afflige on ne peut pas plus. Je donnerais tout au monde pour que ces immondes voyous n’aient pas eu cette méchante invention. Malheureusement, il n’y a pas de surveillance possible de chez moi et je ne peux pas prier les voisins, qui d’ailleurs n’en tiendraient aucun compte, de faire attention à ce qui se passe à ma porte. Aussi, cet incident m’est-il aussi désagréable que possible. Mon cher bien-aimé, mon adoré, mon doux amour, quand je pense que tu seras venu si près de moi avec la bonne intention de me donner quelques instants et que je n’ai pas pu en profiter pour la cause la plus stupide, je suis exaspérée. Si je tenais un de ces voyous sous la main, je crois que je lui ferais un très mauvais parti.

Juliette

MVHP, MS a7990
Transcription de Joëlle Roubine et Michèle Bertaux

a) « arrangé ».


25 octobre [1847], lundi après-midi, 2 h.

J’espère que tu n’as rien contre moi, mon petit Toto, et que la mine trop grise que je regarde n’est pas à mon adresse ? Cette certitude me satisfait médiocrement car je n’aime pas à te savoir triste et mécontent n’importe à quel sujet. Aussi, mon cher petit homme, je me creuse la tête pour savoir ce qui peut assombrir ta jolie petite figure. Qu’est-ce qui vous manque, vieux Chinois ? Vous avez une malle ravissante, vous salissez toute ma maison depuis un bout jusqu’à l’autre, vous ne me laissez pas parler du tout.
Qu’est-ce qu’il vous faut donc pour être heureux, dîtes ? Si cela dépend de moi, c’est déjà fait car rien ne me coûtera pour que vous soyez content. Je voudrais bien que vous m’en disiez autant à moi, vous verriez avec quelle indiscrétion j’userais de votre bonne volonté. D’y penser, le bonheur m’en vient à la bouche. Malheureusement, vous n’êtes pas si BÊTE que de vous mettre à même mon appétit glouton. C’est très prudent, mais alors je veux que vous soyez GEAIa. J’en ai bien le droit j’espère. Mon Victor adoré, si tu as quelque chose outre ton travail qui te fatigue et te tourmente, je te plains et je t’aime. Si au contraire je suis en proie à une désagréable vision, je suis contente et je t’adore.

Juliette

MVHP, MS a7991
Transcription de Joëlle Roubine et Michèle Bertaux

a) « GEAIE ».

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