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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 3 décembre 1855, lundi midi

Bonjour, mon cher petit bien-aimé, bonjour, mon adoré petit homme, bonjour. Je t’attends et je t’espère avec toute l’impatience de mon amour. Je compte sortir pour prendre un peu d’air extérieur et de bonheur, car la vie est doublement triste aujourd’hui à CROWN HOTEL [1]. Le petit Préveraud a passé une très mauvaise nuit et je ne crois pas qu’il puisse se lever aujourd’hui. Le médecin ne paraît pas inquiet pourtant. Quant à la petite femme, elle est très tourmentée et très fatiguée. J’ai mis Suzanne à sa disposition pour toute espèce de service. Quant à moi, je la soutiens le plus que je peux à force d’amitié et de sécurité apparente. C’est tout ce que je peux faire malheureusement. Tout cela est assez triste, mon cher adoré, et a bien besoin de ton rayonnement pour ne pas paraître lugubre. Dans ce moment-ci, j’entends une discussion politique entre Cahaigne et un Français (commis voyageur) nouveau venu. Il est impossible de rien entendre de plus niais et de plus lourdement emphatique que ce dialogue entre L’ARTICLE PARIS bonapartiste et le démagogue classique et culotteur de pipe en question. J’espère cependant qu’ils vont s’arracher leur petit reste de cheveux à en juger par la véhémence de leur stupidité, ce qui ne les empêche pas de dégorger autant de fumée de tabac que d’ineptie. Pouah ! c’est à en être asphyxiéa par les oreilles, par les yeux et par la gorge. Autre nouvelle, Barbieux est de retour de son voyage au long cours. Vous voyez, mon cher petit homme, que je vous tiens au courant de toutes les nouvelles que je sais. Faites-en autant pour moi de toutes celles que vous savez et nous serons aussi bien informés l’un que l’autre. En attendant, je vous aime sans aucune espèce de restriction ou de réticence de cœur, d’âme, de bouche, et d’yeux.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16376, f. 386-387
Transcription de Magali Vaugier assistée de Guy Rosa

a) « asphixié ».

Notes

[1Juliette et les Préveraud logent à Crown Hotel depuis leur arrivée à Guernesey. Elle déménagera en janvier pour le 8 rue Havelet. M. Préveraud est souffrant.

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