Guernesey, 19 juillet 1862, samedi matin, 7 h. ¾.
Bonjour, mon bien-aimé, bonjour, paix et bonheur à toi. Comment as-tu passé la nuit, mon cher adoré ? Mieux que la dernière, j’espère, et pas de coliques non plus ? Tu paraissais en bonnes dispositions hier en me quittant. J’espère que tu y seras resté et affermi encore davantage.
Je suis très contente du parti que tu as pris de voyager un peu. C’était l’avis de Corbin toujours, mais ton agacement croissant te rend la diversion et le changement d’air tout à fait indispensablesa. Aussi, mon pauvre bien-aimé, loin de te retenir, je suis prête à t’accompagner dès que tu voudras. Je vais dès aujourd’hui apprêter tout doucement les choses du voyage. Il faudra que lundi je fasse une petite excursion en ville pour les choses nécessaires. Toi-même de ton côté il faut donner des ordres pour que ton linge soit blanc et en bon état, y compris les gilets et les caleçons, les chaussettes et les mouchoirs. Il faudra en outre me faire apporter ton habit. En attendant, je prépare ta chère petite fête pour ce soir. J’espère que tu seras assez bien pour n’en pas être ennuyéb et pour lui sourire un peu. Quant à moi, mon cher petit homme, je serai ce que tu seras car mon bonheur et ma joie ne sont jamais que le reflet des tiens mais dans quelque disposition que tu sois, je t’aime de toute mon âme.
BNF, Mss, NAF 16383, f. 183
Transcription de Camille Guicheteau assistée de Guy Rosa
a) « indispensable ».
b) « ennuiée ».