Paris, 31 mars 1882, vendredi matin, 9 h.
J’espérais que tu serais plus content de ta nuit, mon pauvre bien-aimé, mais je vois avec regret qu’il n’en est rien. À quoi cela tient-il ? Peut-être à la saison. Mais, quel qu’en soit le motif, il résulte que tu passes de mauvaises nuits et cela m’attriste, car je fais de ta santé ma joie et de ta vie ma vie. Je crois que nous aurions besoin tous les deux de changer d’air et d’habitudes de vivre. Autrefois nous ne manquions jamais de voyager tous les ans ; mais voilà tantôt trois ans que nous ne sommes pas sortis de Paris et de la vie fatigantea du monde… à domicile. Je crois qu’un peu de villégiature à Guernesey nous ferait grand bien à tous les deux. Aussi dès que tu auras publié Torquemada et que les vacances parlementaires seront venues nous ferons bien de prendre notre volée par-delà l’océan. En attendant tâchons de ne pas nous laisser trop envahir par toutes sortes de malaises et aimons-nous au plus près du cœur.
Je t’adore.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16403, f. 41
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette
a) « fatiguante ».