Guernesey, 5 novembre 1858, vendredi, 8 h. du m[atin]
Bonjour, mon Victor bien-aimé, bonjour, mon adoré petit homme, comment vas-tu ce matin ? As-tu mieux dormi cette nuit que les précédentes ? That is the question à laquelle tu me répondras quand je te verrai. D’ici là, j’ai l’espoir que tu vas bien et que tout est à souhait pour toi, mon bien-aimé. J’espère que les Belges [1] n’auront pas le nez d’arriver le jour du dîner de ces pauvres Prévéraud que cela attraperait beaucoup, et moi encore plus, parce que je n’ai de plaisir qu’avec toi. Je ne sais pas pourquoi j’ai un pressentiment de ce guignon dont je sens que je pourrais bien être le fil conducteur en ma qualité de Juju guignonnante au premier chef. En attendant tu assisteras tantôt au boui-boui démocratique de Duverdier, ce qui ne t’amusera pas beaucoup. Je voudrais déjà que tu en sois revenu parce que j’aurai quelque chance de te garder au coin de mon feu qui n’est pas à dédaigner par ce temps maussade et pluvieux. Mais, où que tu sois, mon bien-aimé, près ou loin de moi, ma pensée, mon cœur et mon âme sont avec toi et je t’adore.
Bnf, Mss, NAF 16379, f. 313
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette