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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 29 septembre 1858, mercredi matin, 8 h.

Bonjour, mon bon, mon grand, mon doux, mon ineffable bien-aimé, bonjour. Je viens de donner pour toi à Marie Turpin ma dernière aiguille courbe. Elle m’a bien promis de me la rapporter mais je n’y compte pas. De fait, elles auront toutes passé dans ta maison, sans grande utilité, car jusqu’à présent toutes celles que je t’ai données n’ont pas encore servi et ne serviront jamais, car elles sont perdues probablement. Le dommage n’est pas grand ; mais il n’est pas réparable dans ce pays-ci, voilà la compensation. Quant à mon crin, je le garde en prévision de chaises à garnir ou de traversin à improviser pour des cas de maladie ou de visites. La difficulté de remplacer ou de renouveler tout ce qui s’use dans mon mobilier finit par me rendre sage, c’est-à-dire ménagère, c’est-à-dire égoïste et rapace. Cet état contre MA nature ne m’en rend pas plus estimable ni plus heureuse à mes propres yeux et j’aimerais mieux une conformité de générosité et d’échange fraternel que ce soi-seul respectif auquel je suis forcée par la maussade expérience. Tout cela ne m’empêche pas de reconnaître que tu avais raison hier au soir en me recommandant la résignation et en me conseillant la prière comme contrepoids aux malheurs inexpliqués de ma vie. Cette prescription m’est d’autant plus facile et plus douce à suivre que c’est une manière de t’aimer encore plus et encore mieux.

Bnf, Mss, NAF 16379, f. 276
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette

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