Guernesey, 7a avril 1858, mercredi soir, 6 h. ½
Je t’aime, mon Victor, voilà ce qui sort tout naturellement de mon cœur ; quant au reste tu n’y tiens pas plus que moi. Aussi, je ne m’en mets pas en peine et mon gribouillis sera ce qu’il pourra car je ne prends de responsabilité que pour mon amour. Je t’aime, mon Victor, plus que tout ce que tu peux désirer de mon cœur et de mon âme. Tu as beau être injuste et cruel trop souvent pour moi, je t’aime et toutes mes souffrances et toutes mes rancunes ne servent qu’à augmenter mon amour pour toi. Je peux être heureuse ou malheureuse par toi parce que tout mon bonheur me vient de toi mais il ne dépend ni de toi ni de moi, que je ne t’aime pas de toute mon âme. Reviens bien vite, mon bien-aimé, pour que je t’en donne la preuve dans un baiser et pour que je te sourie dans mes tendresses comme je te bénis dans mon cœur à présent. Je t’attends. Je t’adore.
J.
BnF, Mss, NAF 16379, f. 75
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette
a) « 6 », biffé et remplacé par 7 d’une autre main.