Guernesey, 30 janvier [18]68, jeudi, 7 h. ¾ du m[atin]
Je ne suis pas contente, mon grand bien-aimé, parce que je viens de te manquer d’un clin d’œil malgré toute mon attention à guetter ton passage. Cela ne m’a pas empêchéea de lâcher la volée à mes tendresses. Tant pis pour elles si elles trouvent ta porte close. J’espère que ta nuit a été aussi bonne que la mienne, ce qui me console un peu de ma déconvenue de tout à l’heure. Mais j’y pense, mon pauvre affairé, peut-être auras-tu la chance que tes comédiens repartent samedi matin par le packet [1]. Cela serait bien à désirer car je crains que ton projet de les traiter chez toi ne rencontre beaucoup d’obstacles. D’une part l’incurie paresseuse de ta cuisinière, d’autre part la désorganisation matérielle de ta maison, sans compter peut-être l’impossibilité de faire asseoir à ta table quinze ou seize personnes et par-dessus tout cela la fatigue et le dérangement que cela te cause [illis.] me fait désirer que ces braves gens obtiennent beaucoup de bravos et fichent un camp rapide sans prendre le temps de déjeuner.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 29
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « empêcher ».