Guernesey, 27 janvier [18]68, lundi matin, 8 h. ¼
Il va sans dire que je t’adore, que j’ai trop bien dormi et que je souhaite que tu sois exactement dans la même situation de cœur et de paresse que moi, sans un seul QUE RETRANCHÉ. À propos de que retranché, le pauvre petit Gavroche est malade depuis hier mais je ne l’attribue à aucun retranchement mal séant. Seulement je crois qu’il est dans l’âge critique pour les chats comme pour les chiens. J’espère qu’il s’en tirera bien car les soins de Suzanne ne lui manqueront pasa et elle s’y entend très bien à soigner bêtes et gens. Donc il n’y a pas lieu de s’inquiéter jusqu’à présent de ce pauvre petit minet. Certainement, je ne serais pas fâchée de voir le nez des bibelots que Kesler me destine mais je suis encore bien plus désireuse de reprendre le bras droit de l’I grec [1] voire même le bras gauche appuyé sur le tien, DE BRAS. J’avoue que cela me tente plus que n’importe quel bric-à-brac. Seulement il faut que ma goutteuse patteb veuille bien s’y prêter. Jusqu’à présent, elle n’avance ni recule qu’avec le baromètre, ce qui n’est pas le moyen d’aller bien loin. Heureusement que voici bientôt le beau temps, c’est-à-dire les jambes, les ailes, le cœur, l’âme, le soleil, l’amour, tout enfin !
BnF, Mss, NAF 16389, f. 26
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « ne lui manquerons pas ».
b) « ma gouteuse patte ».