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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 décembre [1838], mardi, midi ½

Bonjour mon petit homme chéri. Quand comptez-vous donc venir mon amour ? Quand comptez-vous reprendre vos anciennes habitudes ? Vous venez de mois en mois une fois et encore est-ce à la suite de méchancetés effroyables qui me mettent dans un état hideux et qui m’empêchent de chômer votre bienvenue d’une manière digne de notre amour. Il faudra bien cependant que vous repreniez votre service auprès de moi ou sinon gare les moues et les scènes. Je suis capable de tout si vous m’exaspérez. Tout ce verbiage, mon petit homme, ne tend qu’à te dire que je te désire, que je t’ai attendu cette nuit et que tu n’es pas venu, que je t’aime de toute mon âme et que j’ai besoin de ton amour. Du reste je crains que tu n’aies passé ta nuit à travailler comme tu fais toujours sans que je puisse t’en empêcher mais je sais que les pardons et les prières sont insuffisantsa pour empêcher tes veilles, il faudrait autre chose c’est-à-dire un état qui me suffise et qui subvienne à tous mes besoins et malheureusement je suis loin de l’avoir, cet état…
Je t’aime mon Victor, je t’aime. Je suis triste, mais je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 198-199
Transcription de Sophie Gondolle assistée de Gérard Pouchain

a) « insuffisantes ».


4 décembre [1838], mardi soir, 10 h. ¼

Certainement, mon cher adoré, que je suis bien bonne et que je t’aime plus que jamais. Si tu pouvais voir le fond de mon cœur même dans les moments où je suis la plus méchante tu serais bien heureux et bien tranquille. J’ai trouvé Mme Triger chez Mme Pierceau. C’est même là la cause pour laquelle je t’écris si tard. Mon cher adoré, je vous aime. Vous paraissez en douter souvent et vous êtes bien injuste envers tous les deux, car vous êtes adorable et je ne fais que ce que je dois en vous aimant de toute mon âme. J’ai toujours un fond de tristesse car je vois que nos soupers sont bien décidément finis, quoique tu veuilles me faire prendre le change sur la nécessité d’un régime. Malheureusement l’amour n’est pas facile à duper et je ne crois pas du tout que c’est à une sollicitude mal entendue que tu sacrifies mon bonheur, le seul vrai et le seul bien que tu me donnes depuis notre retour du court voyage de cette année [1]. Je sais que c’est une cause beaucoup plus sérieuse et tout à fait au-dessus de ma volonté et de mon désir et même de ma santé qui nous enlève nos soupers, c’est-à-dire la vie de l’âme, le pain de l’amour, le bonheur et la joie. Je t’aime mon Victor je t’adore.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16336, f. 200-201
Transcription de Sophie Gondolle assistée de Gérard Pouchain

Notes

[1Le voyage annuel s’est déroulé du 18 au 28 août, en Champagne.

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