Paris, 25 décembre [18]73, jeudi matin, 11 h.
J’espère, mon pauvre bien-aimé, que Mariette va apporter de bonnes nouvelles de la nuit de ton cher Petit Victor [1] qui changera en joie et en bonheur toutes tes tristesses et toutes tes inquiétudes. En attendant, je pense avec attendrissement à la sainte crédulité de tes chers petits enfants et en leur douce confiance en toi et au Petit Noël. C’est bien dommage que nous n’ayons pas pu assister ce matin à leur épanouissement devant la SURPRISE annoncée depuis si longtemps. Je regrette encore, et surtout, que ce ne soit pas par ta pantouflea que la fête des joujoux ait commencé. Ce n’est ni ta faute, ni celle de personne, mais à l’éloignement des deux maisons et surtout à la nécessité de garder ici un en-cas de poupée et de soldats armés de toute pièce pour les jours où ces chers petits viennent voir Papapa. En revanche, nous assisterons à leur émerveillement ce soir chez Allix devant la féérie de son arbre de Noël. Hélas ! Cela me reporte à tes pauvres petits de Guernesey qui n’auront rien de toi cette année [2] ; ni pain, ni vêtements, ni joujoux et cependant Dieu est partout. J’espère qu’il est au chevet de ton pauvre malade en ce moment, faisant acte de sa toute puissante bonté en le tournant vers la vie et vers la santé. J’espère, je prie, je t’aime et je le bénis à travers toi et ton cher fils.
BnF, Mss, NAF 16394, f. 357
Transcription de Manon Da Costa assistée de Florence Naugrette
a) « pantouffle ».