Paris, 16 mars [18]77, vendredi soir, 4 h. ½
Cher adoré, c’est un corps à corps avec le mal que je livre depuis cette nuit. Jusqu’à présent je tiens bon et j’espère que je finirai par tomber d’ici à ce soir la méchante goutte qui me harcèle. Entre temps, pendant que de ton côté tu donnais audience au citoyen Templier, moi je recevais, par surprise, un ex-rédacteur du Rappel, Gaston Lemay. Il paraît qu’il est au plus mal avec l’administration Vacquerie et E. Lefèvre au sujet de son voyage en Orient qu’on ne veut pas lui payer autant qu’il l’estime, à tort probablement. Tu penses bien que je me suis entièrement abstenue dans cette affaire que je ne connais pas. Si ce n’est pour revendiquer la justice, la générosité et la probité cristalline de nos deux braves amis du Rappel. Ce qui résulte de la chose telle qu’il la présente, c’est un procès devant le tribunal de commerce fait par le dit Gaston Lemay au refus de Vacquerie et de Lefèvre d’accepter un arbitrage après y avoir précédemment consenti. Il me supplie de te dire que c’est à son corps défendant qu’il le fait, mais qu’il ne peut pas faire autrement. Moi je te supplie de m’aimer comme je t’aime si tu veux que je guérisse.
BnF, Mss, NAF 16398, f. 78
Transcription de Guy Rosa