Paris, 18 mars 1880, jeudi matin, 8 h.
Cher bien-aimé, il me paraît que tu as très bien dormi cette nuit ? Pendant du moins que j’étais éveillée, c’est-à-dire pendant bien des heures. J’espère ne pas m’être trompée. Je viens d’échanger avec Georges un tendre bonjour. Il s’en allait allégrement au collège, comme un brave petit écolier qu’il est. Puis je viens de lire une nouvelle lettre de Sarcey [1] qui te demande s’il ne sera pas indiscret en acceptant ton invitation flottante dimanche prochain, 21, tous les autres jours en semaine étant pris par des conférences ou des premières représentations. Pour ma part, je n’y vois aucun obstacle en prenant d’avance toutes les précautions pour n’être pas treize à table [2]. Mlle Jung t’envoie une carte postale pour te dire qu’elle n’a pas reçu le numéro du journal Le Voltaire [3] consacré au cinquantenaire de Hernani que lui avait annoncé le citoyen Lesclide, et qu’elle te prie de lui faire envoyer directement toi-même à son adresse. D’autre part, Pierre Véron dans le Charivari d’aujourd’hui a fait un article très chaud [4] sur ton livre paru lundi [5]. Je crois que tu devrais l’en remercier. À ce propos, iras-tu au Sénat aujourd’hui, et à quelle heure iras-tu ? La séance publique est à trois heures, et moi je suis à tes ordres à toute heure, en tout lieu, partout, et toujours.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16401, f. 78
Transcription de Blandine Bourdy et Claire Josselin