6 août [1845], mercredi soir, 10 h. ¼a
Cher adoré bien-aimé, ma vie, mon bonheur, mon amour, mon pauvre bien-aimé, je t’envoie mon âme dans le baiser que je mets ici : b Prends-la et ne me la rends jamais. Je n’en sais que faire d’ailleurs et je [illis.] mon courage comme les pierres. Je t’en dirai de bonnes nouvelles, surtout pendant les huitc jours qui viennent de s’écouler.
Bonsoir, mon adoré, dors bien, il est temps. Il est l’heure de coucher les chers petits Toto malades. Avant de me coucher, j’ai voulu te dire un petit bonsoir bien doux, bien tendre et bien amoureux. Je ne pourrais pas dormir sans cela. Dors bien, mon adoré, dépêche-toi de te guérir que je puisse te baiser, te voir et te caresser à discrétion et à indiscrétion. Depuis huit jours que je suis [plusieurs mots illisibles] toi, je ne vis pas. Il me semble que je fais un rêve pénible dont toi seul peuxd me réveiller. Je n’ose pas penser que je ne te verrai pas avant vendredi et pourtant tu me l’as dit dans ta chère petite méchante bonne lettre [1]. Cette menace plutôt que cette promesse m’a rendue bien triste. Il a fallu que je me dise que c’était l’ordre du médecin et qu’il y allait de ta chère santé pour ne pas me révolter et pour ne pas t’accuser. Mais je te supplie, mon Victor, de mettre le temps bien à profit pour que je n’aie plus à souffrir de cette absence beaucoup trop prolongée. En attendant, je te baise, je t’adore, je voudrais souffrir à ta place et mourir pour toi.
Juliette
Mme Triger et son fils sont partis à [illis.] h. Ils [une ligne illisible].
BnF, Mss, NAF 16360, f. 114-115
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « (1845) » a été rajouté sur le manuscrit par une main différente de celle de Juliette.
b) Dessin :
- © Bibliothèque Nationale de France
c)« les huits ».
d) « peut ».