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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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23 février [1837], jeudi, midi ½

Mon cher petit homme bien aimé, est-ce que tu es plus malade, que tu n’es pas venu ? Je suis bien tourmentée de cette pensée là. Mon Dieu me préserve cependant qu’elle soit vraie, car alors je ne sais pas ce que je deviendrais. J’ai moi-même des douleurs d’entrailles très vives, je ne sais pas d’où cela me vient mais je souffre beaucoup aussi.
L’espoir que tu viendrais cette nuit m’a tellement préoccupéea que je me réveillais d’heure en heure et que je regardais à la pendule pour savoir quand il finirait. Enfin je l’ai vu arriver et j’en ai été plus que triste car je me tourmente encore à l’heure qu’il est par la crainte que tu ne sois plus malade qu’hier.
Je voudrais bien être dans un petit coin de ta chambre, fût-ceb même dans un soulier de Toto pour savoir comment tu vas et ce que tu fais. J’ai hâte de te voir, viens le plus tôt qu’il te sera possible.
Quoique bien souffrante je vais me lever. J’ai bien peur d’avoir une espèce de rechute car je souffre horriblement et j’ai un peu de fièvre et de chaleur à la peau. Je n’ai jamais été moins disposée à recevoir personne que ces deux jours-ci, et ce sont justement ceux-ci que ces péronnelles ont choisi pour m’ennuyerc et m’impatienter.
J’ai besoin de te voir, j’ai besoin d’entendre ta voix chérie, j’ai besoin de toucher et de baiser tes beaux cheveux et tes blanches mains. Viens le plus tôt possible mon Victor bien aimé. Je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16329, f. 199-200
Transcription d’Érika Gomez assistée de Florence Naugrette

a) « préocupé ».
b) « fusse ».
c) « ennuier »


23a [février 1837], jeudi soir, 9 h. ½

Mon cher petit homme, vous ne vous étiez pas tout à fait trompé, la pauvre François était en effet venue pour me demander quand je croyais pouvoir lui donner quelque acompteb ; elle est fort tourmentée par ses créanciers. Je lui ai répondu le mieux que j’ai pu, et elle s’en est allée, sinon satisfaite, du moins espérant.
Je vous aime mon Toto bien aimé, je vous aime plus que vous, car à votre place je sais bien ce que j’aurais fait depuis long temps. Enfin nous verrons comment vous terminerez cette espèce de drôlerie sans nom que vous me jouez depuis bientôt quinze jours, je vous attends de .... pied ferme.
Jour mon vieux TOTO. Tâchez donc d’en finir avec votre travail. Est-ce que vous croyez que ça m’arrange ? Mon petit Toto chéri je vous aime, je vous aime et puis encore je vous aime. Tout ce que je vous dis avant ou après ce mot là, c’est pour avoir le prétexte de vous le répéter cent fois, mille fois, et mille millions de foisc. Je vous aime, je vous aime. Je suis sûre que vous viendrez encore très tard ce soir, vilain et vieux Toto, aussi je vous DROGNE ET JE SUIS TRÈS MOUZONNE. Non ça c’est pas vrai, je suis très gentille, au contraire, et je serai très gracieuse et très charmante quand tu viendras n’importe à quelle heure.
En attendant je baise toute votre exquise petite personne.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16329, f. 201-202
Transcription d’Érika Gomez assistée de Florence Naugrette

a) 24 corrigé d’une autre main sur le manuscrit.
b) « quelqu’acompte ».
c) « foi ».

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