rentrée à 7 h. 10 minutes
t’écrire à 10 h. précises
Je t’ai quitté, mon cher bien-aimé, sans savoir si tu ne reviendrais pas à cette charmante place d’où je pouvais te voir et t’entendre ; mais j’étais depuis un grand moment, l’objet de la curiosité d’un vieila homme en casquette et d’une vieilleb femme en chapeau, ce qui m’a décidéec à quitter la place. C’est surtout l’observation presque impertinente d’un ouvrier. Je n’ai pas voulud sacrifier à un moment tout un avenir de bonheur, je me suis donc en alléee en leur souhaitant pour bonsoir à tous la cataracte et le choléra morbus [1].
Mon cher Victor, mon adoré, tu ne sais pas combien je t’aime. Tu ne le sauras jamais puisque tu te méprends sur mes jalousies, sur mes larmes, sur mes paroles.
Vous êtes encore un fier littérateur en amour qu’il faille vous faire des erratum ainsi conçus. Jalousie, lisez amour. Colère, amertume, lisez amour. Plaintes, regrets, lisez amour. Partout où il y a faute d’impression, mettez amour. Amour, rien qu’amour puisque c’est le fond, c’est le texte de toute ma vie. Oui, je t’aime, je n’aime que toi, je ne peux pas vivre sans toi. Je te préfère à tous. Oui, oui mille fois oui. Je suis heureuse, je ne veux pas d’autres bonheurs. Vivre et mourir pour toi. Je t’aime.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16323, f. 221-222
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « vieux ».
b) « vielle ».
c) « décidé ».
d) « voulue ».
e) « allé ».